Synthèse des résultats

 Les livres blancs et posters des quatre premiers thèmes sont disponibles sur la page Publications.

  Thème n°1 : le monde en 2040 et 2070

On comptera environ 9 milliards d’êtres humains en 2040, puis 10,5 milliards en 2070. La plus grande part de cette croissance se produira en Asie et en Afrique. En parallèle, les conditions de vie dans les pays émergents et en développement s’amélioreront. Cela conduira à une augmentation importante de la demande en transport aérien, ce qui nécessitera de nouveaux aéroports et une plus grande intégration régionale. Après l’Europe, l’Afrique (SAATM) et l’Asie du sud-est (ASEAN-SAM) sont en chemin pour devenir les prochains marchés uniques du transport aérien.

Approximativement 68% de l’humanité vivra en milieu urbain en 2050. La croissance des mégalopoles créera des défis en matière de mobilité et donnera naissance à de nouvelles mégacités aéronautiques. L’emprise large des plus grandes villes et la congestion au sol pourraient promouvoir les systèmes à plusieurs aéroports et les plateformes secondaires. Les communautés de plus petite taille et rurales pourraient être revitalisées ou grandir avec des résidents à la recherche d’un autre mode de vie. Les aéroports locaux continueront de jouer un rôle vital en les connectant au monde.

Les salaires augmentent dans les pays en développement. Des taxes carbone sur les transports sont en discussion. Produire à l’autre bout du monde n’est plus aussi profitable qu’avant. Les travailleurs des nations occidentales demandent à relocaliser la production et l’emploi. Un nombre croissant de consommateurs achètent local et appellent à l’économie circulaire. La relocalisation de la production des biens et sa décentralisation sur des sites plus locaux facilitées par la révolution de l’outillage et des process industriels (ex. imprimerie 3D) peut profondément impacter le fret aérien.

L’espérance de vie s’améliore dans le monde. La part des personnes âgées continuera de croître – et celles-ci seront plus riches et en meilleure santé que leur aïeux. Les enfants nés après 2000 grandissent avec les technologies de l’information. Hyperconnectées, les communautés de 2040 et plus encore de 2070 n’auront pas la même notion du temps et de l’espace. Les aéroports du futur devront répondre et réconcilier ces différents besoins.

La corrélation entre les activités humaines et le réchauffement climatique a été largement documenté. Les politiques actuelles et les actions réelles tout autour du monde sont globalement en deçà des objectifs définis dans le cadre de l’Accord de Paris. Face à la plus grande menace de l’histoire de l’humanité, l’industrie de l’aviation continuera ses efforts sans précédents pour réduire son emprunte environnementale. Alors que le « meilleur » réchauffement est celui que nous ne créons pas, les aéroports devront s’adapter pour émettre moins, mais aussi pour être plus robuste face au changement climatique.

 

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Thème n°2 : modèles d’affaire durables et nouvelles sources de financement

Pendant la majeure partie du 20ème siècle, les aéroports étaient planifiés, construits et opérés par les gouvernements centraux comme outils de souveraineté, de prestige, de défense national et d’aménagement du territoire. Dans le contexte de la croissance des activités auxiliaires et des dépenses d’investissement, ils ont été ensuite transformés en organisations dédiées à l’exploitation des aéroports avec souvent un statut de société de droit privé et un capital majoritairement détenu par les états. Ce changement vers plus d’indépendance a promu une culture de l’efficacité et une vision stratégique, établit une autonomie de décision vis-à-vis des priorités gouvernementales, et une autonomie de la gouvernance elle-même vis-à-vis des agendas politiques.

La privatisation des aéroports peut être vu comme l’étape suivante de la corporatisation à capital étatique. Des projets de privatisation existent dans toutes les régions du monde – sous des formes différentes. Le contrôle public de la gestion des aéroports n’est plus considéré comme indispensable aux intérêts nationaux, et le secteur privé est vu comme plus versatile, efficace et innovant. Ainsi, les gouvernements peuvent se concentrer sur leurs missions de régulateur du marché et d’autorité de surveillance de la sécurité et de la sûreté.

Les aéroports commerciaux doivent pouvoir financer la maintenance et les développements réalistes de leur infrastructure de manière adéquate à travers les redevances puisqu’ils ne peuvent plus se reposer sur une aide publique directe. Les concessions et autres formes de PPP doivent profiter aux deux parties et assurer une juste répartition des bénéfices et des dépenses. Des attentes élevées sur le développement des infrastructures de la part des états qui ne serait pas cohérentes avec le niveau réel de trafic peuvent remettre en question la viabilité financière des aéroports requérant d’importants investissements.

Ces considérations ne s’appliquent pas nécessairement aux plus petits aéroports. Leur équilibre financier est souvent plus précaire. Alors que certains d’entre eux n’apparaissent pas comme rentable, leur impact sur l’économie locale et la connectivité doivent être pris en considération. De nombreuses plateformes desservant des zones isolées fournissent un accès vital au monde pour les missions de taxi, d’ambulance et de délégation de service public. Ils resteront des infrastructures publiques et nécessiteront des financements directs de la part des gouvernements locaux ou nationaux. Ils ne peuvent pas être profitables et ce n’est pas leur raison d’être.

De nombreux programmes existent à travers le monde pour assurer que les aéroports répondent aux critères de sécurité et aux besoins des nations. Leurs forme et ampleur dépendent de la taille des aéroports et des particularités locales. Ces fonds excluent habituellement les aérogares. Pour réhabiliter et développer les terminaux, les banques d’investissements nationales et régionales peuvent prêter à des taux d’intérêts plus bas tant que la société d’exploitation est basée dans le même pays. Dans tous les cas, les exploitants d’aéroport et les gouvernements doivent évaluer les opportunités créées par ces projets avec soins, en considérant le niveau de risque financier et d’endettement.

Le principe fondamental est que l’aviation doit payer pour elle-même. En effet, l’injection directe de fonds publics venant du budget général des états pose des questions légitimes sur les priorités nationales – en particulier quand les projets financés ne sont pas rentables ou ne sont pas nécessairement justifiés du point de vue du profit social. Les concessions à des acteurs privés de l’infrastructure développée avec des budgets publics posent également la question d’un juste retour sur investissement aux gouvernements.

Investir dans l’innovation est crucial non seulement pour l’industrie aéroportuaire mais pour l’écosystème du transport aérien dans son ensemble. Certains grands exploitants d’aéroport ont l’ambition d’être leaders en innovation. Cependant, les tendances et les changements importants explorés dans les prochains thèmes (ex. l’automatisation du management du trafic aérien, la cybersécurité, etc.) requièrent des efforts plus larges supportés par des politiques et des financements nationaux.

 

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Thème n°3 : smart airports à l’ère des technologies de l’information

La révolution des technologies de l’information dans le parcours passagers est déjà ici. Les passagers échangent des données avec et reçoivent des informations personnalisées de la part des compagnies et des aéroports via leurs smartphones. Ces technologies connectées fournissent de l’information géoréférencée et peuvent faciliter le parcours à travers les grands hubs, améliorant l’accessibilité aux passagers en difficultés. En retour, ces outils de l’Internet of Things (IoT) envoient aux exploitants et à d’autres parties prenantes des données précieuses sur les flux passagers.

Les aéroports et les compagnies aériennes ont déployées la reconnaissance faciale pour accélérer les process et minimiser les temps d’embarquement à la gate. D’ici 2040, la biométrie sera disponible à d’autres étapes du parcours passagers de la porte du terminal jusqu’à celle d’embarquement. Les empreintes digitales et l’identité faciale pourraient être les futures « clés » de votre vol. A moyen-terme, ces solutions réduiront les temps d’attente et augmenteront l’automatisation des process de contrôle et d’identification aux côtés d’autres technologies comme la dépose automatique des bagages en self-service.

Poursuivant la digitalisation de l’information amorcée par le Système d’Information Géographique (SIG) aéroportuaire, l’Airport Building Information Modelling (ABIM) ouvrira de nouvelles perspectives à la gestion des actifs et à l’exploitation. Les Remote Tower Centers (RTC) augmenteront la sécurité sur les aéroports à faible trafic qui sont ou pourraient devenir sans tour de contrôle. Les technologies développées pour les RTC pourraient aussi bénéficier aux tours de contrôles « classiques » à travers par exemple des outils de réalité augmentée utiles au contrôle, à la sécurité, et à la robustesse.

Le besoin d’améliorer la ponctualité et minimiser les impacts des conditions dégradées sur les opérations de vol a conduit à l’émergence de l’Airport Collaborative Decision Making (A-CDM). Ce concept repose sur le partage de l’information sur le statut de chaque vol entre les acteurs des opérations en temps réel. L’extension des concepts du CDM à l’ensemble de l’aéroport s’appelle Total Airport Management (TAM), et il est supporté par des centres de contrôles intégrés (APOC). A une échelle plus large, le System Wide Information Management (SWIM) va fournir une plateforme et des standards unifiés pour le partage de l’information avec un point d’accès unique aux données d’ATFM.

La collecte et le traitement de ces volumes de données requiert des standards et une infrastructure adaptés pour supporter leur transfert et leur stockage. La plupart des aéroports commerciaux ont maintenant des data centers. Ils seront nourris par l’Internet of Things – et plus tard par l’Internet of Everything. Les process et moyens émergents pour analyser ces données sont en train d’étendre l’horizon des possibles de manière fulgurante. La machine learning et l’intelligence artificielle peuvent extraire des profils et des tendances des bases de données aéroportuaires (AODB) pour les besoins de planifications, de reconnaissance et de prise de décision.

Le deep learning utilisant les réseaux neuraux artificiels (ANN) et l’automatisation avancée seront les prochaines étapes et pourront assister, suppléer et même remplacer l’analyse et la décision humaine dans des domaines comme la gestion des ressources opérationnelles et celle des actifs. Alors que les aéroports reposent de manière croissante sur les systèmes de l’information et l’échange des données, ils deviennent de plus en plus vulnérables aux incidents. Lors de la transition vers de nouveaux systèmes supportant leurs opérations, les aéroports doivent assurer la robustesse de leurs systèmes et développer des plans de continuité de l’activité dans le cas où ces systèmes ne sont plus disponibles. Ils doivent aussi considérer les aspects de cybersécurité de ces technologies.

 

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Thème n°4 : les menaces sûreté et les activités illicites du futur

En 2017, l’ancien Administrateur de la TSA Peter V. Nuffenger déclarait « qu’il y a une nature spectaculaire dans les attaques contre l’aviation. Premièrement, elles disent quelque chose sur vous en tant que groupe terroriste si vous êtes capables d’outrepasser tous les systèmes conçus pour prévenir des dommages. Ensuite, il y a aussi un grand impact psychologique et un large impact économique. » Ce qui était vrai en 2017 sera toujours applicable en 2040 et 2070.

Les schémas d’attaque les plus communs sont restés inchangés depuis les années 1970, avec en particulier les attentats à la bombe à l’enregistrement ou aux tapis de livraison des bagages et ceux à l’arme à feu en zone publique des aérogares. Ces modes d’action maximisent les dommages, le nombre de victimes et l’impact médiatique alors qu’ils sont difficiles à prévenir à moins que ces efforts ne soient identifiés bien avant le passage à l’action grâce au travail de renseignement et d’enquête policière.

Les aéroports ne devraient plus jamais être la porte d’accès aux aéronefs pour les organisations terroristes. Dans la période qui a immédiatement suivie les attentats du 11 septembre, les pays les plus exposés au risque terroriste ont pris des mesures exceptionnelles pour prévenir les détournements d’avion et les attentats à bord. Près de multiples ajustements, ces standards de sûreté fournissent aujourd’hui un filet efficace. Le nombre de détournement depuis les pays de départ qui les ont mis en place s’est très fortement réduit, et la communauté de l’aviation est maintenant mieux préparée à contrecarer des tentatives en vol.

Comme en sécurité aéronautique, le modèle des plaques de Reason s’applique en sûreté. Ajouter des couches de moyens et de politiques différentes réduit la probabilité de succès des attaques. Parce que les terroristes s’adaptent aux contre-mesures et innovent, ces couches de sûreté doivent petre versatiles et évolutives.

Elles sont déjà différentes d’une région à l’autre selon le niveau d’activité terroriste aux niveaux local et global. Dans le futur, elles devraient être différentes d’un aéroport à l’autre selon la réalité de la menace. Cette approche basée sur le risque est promue par l’OACI à travers le GASeP.

Le cyberterrorisme d’état est aussi une menace croissante. Au cours de la dernière décennie, les attaques de masse avec de forte suspiscion de soutien de la part d’états se sont ,ultipliés. Les dictateurs et les groupes malintentionnés pourraient aller plus loin et essayer de porter atteinte à l’intégrit du transport aérien. Plus encore, des virus ciblant des infrastructures spécifiques de systèmes d’information peuvent devenir hors de contrôle et contaminer d’autres réseaux et des systèmes critiques (ex. Stuxnet, 2010).

Les tireurs isolés et les individus suicidaires rejettant notre société pourraient devenir une ,enace ,ajeure du futur – et pas uniquement pour l’aviation. Les sociétés urbaines contemporaines qui ont pour objectif de connecter les masses ont fortement isolés certains de leurs membres. Les maladies mentales sont un mal de notre temp et elles peuvent être exacerbées dans les pays et les cultures de contrôle social rapproché avec un manque de solidarité. Cette pandémie n’est pas encore entièrement reconnue par les gouvernements et est susceptible de créer de nouvequx Unabombers et tireurs isolés.

 

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Thème n°5 : futures enjeux de sécurité aéronautique

D’une manière générale, le nombre de décès par passager-kilomètre payant (RPK) a diminué de manière quasi continuelle depuis les années 1970. Cependant, son évolution au cours du temps a une allure logarithmique – ce qui signifie qu'il devient de plus en plus difficile avec notre conception actuelle de la sécurité de réduire le nombre de victimes alors que la sécurité s’améliore dans son ensemble. Au cours de la seconde moitié du 20ème siècle, les normes de conception des aérodromes étaient principalement conservatrices et normatives. Les progrès de la connaissance globale du contrôle du vol et de l'ingénierie aéroportuaire, renforcés par la nécessité d'héberger des avions plus gros dans les infrastructures existantes, ont montré que ces normes surestiment souvent les risques et certaines fois les sous-estiment. Ces efforts ont encouragé une compréhension mutuelle des acteurs de la conception et de la certification des aérodromes – exploitants aéroportuaires, avionneurs et autorités de l'aviation civile. Plus important encore, cela a créé une dynamique en matière de sécurité et de réglementation qui a permis l'émergence et la montée en puissance de l'approche basée sur les risques.

La plupart des améliorations d'infrastructure possibles pour assurer la sécurité aérienne dans les aéroports ont été déjà développées. Les standards portant sur le « hardware » ont atteint une maturité exceptionnelle. Des mesures d'atténuation ont été élaborées pour remédier aux écarts les plus marquants par rapport à ces normes. Le Système de Gestion de la Sécurité (SGS) est une vision systémique et systématique de la sécurité qui a été adoptée par l'OACI en 2004. Alors que certains pays sont encore en train de l'appliquer dans leurs aéroports, il s'agit désormais d'une norme internationale bien acceptée qui a considérablement contribué à l'avancement de la sécurité opérationnelle – y compris sur les aires de de trafic et incluant les aires de stationnement et les services d’assistance au sol. Le SGS a contribué à rassembler les parties prenantes des opérations aéroportuaires dans les différents aéroports afin de construire une ambition commune en matière de sécurité des vols.

La prochaine frontière pour améliorer les normes de sécurité est celle des systèmes et des données en temps réel. Le partage de données et l'analyse en temps réel de ces données augmenteront à la fois les performances opérationnelles et la sécurité. Par exemple, le manque de données de sécurité disponibles empêche les études d’impact sur la sécurité aéronautique d'être aussi quantitatives et complètes qu'elles devraient l'être, et les Autorités Nationales de l'Aviation d’obtenir une vision détaillée des problèmes de sécurité – une condition pour concevoir un Programme de Sécurité d'État (PSE) efficace. Un signalement plus systématique des accidents et des incidents, et la centralisation de ces données, commencent à aider les aéroports et les agences à parvenir à cette vision et à utiliser les données pour améliorer la sécurité en complément des enseignements tirés directement du terrain.

La prochaine étape pourrait ne plus être basée sur des équipements au sol. L'avenir de la sécurité de l’aire de trafic réside également dans les équipements bord tels que les Systèmes de Prévention des Incursions sur Piste (RIPS), l'échange de données avion-sol et l'utilisation des « big data ». De nombreux cockpits se déplacent déjà sur les aérodromes à l'aide de cartes d'aérodrome numériques dynamiques. Avec les mises à jour en vol, ces cartes pourraient inclure les dernières informations aéronautiques publiées par les aéroports, fournir des informations de guidage accrues pendant le roulage, et sensibiliser et générer des alertes sur les problèmes de sécurité sur l’aire de trafic tels que les incursions sur piste et les restrictions d'envergure.

Il est essentiel de reconnaître que le niveau de sécurité n'est pas le même partout dans le monde. Les aéroports et les autorités de sécurité aérienne doivent s'efforcer à combler l'écart sur les normes de l'OACI. Ils devraient également s'inspirer des pratiques recommandées pour promouvoir la sécurité. De plus, ils doivent prendre conscience de leurs spécificités et leurs retards, et travailler pour y remédier autant que faire ce peu. Le Plan Mondial de Sécurité Aérienne (GASP) de l'OACI appelle à un tel effort dans le monde entier. Le plan précédent n'a pas atteint tous ses objectifs. Le plan en cours vise à amener chaque pays à définir et à mettre en œuvre un PSE. Il est prévu que la prochaine période courant jusqu'à l'horizon 2028 se concentre sur la mise en œuvre de systèmes avancés de supervision de la sécurité, y compris la gestion prédictive des risques – une étape que les pays les plus avancés ont déjà franchi.

À ce jour, le Programme Universel d’Audits de Supervision de la Sécurité (USOAP) révèle que la mise en œuvre effective mondiale moyenne des Standards et Pratiques Recommandées (SARP) de l’OACI en ce qui concerne les aérodromes est de 62,29%. Compte tenu des éléments en jeu, il s'agit d'une mauvaise performance – et c'est l'un des taux d'implémentation les plus bas de tous les domaines USOAP. Les aéroports et les autres parties prenantes des opérations aériennes ont besoin d'autorités nationales de l'aviation fortes pour soutenir l’industrie nationale et assurer la sécurité de l'écosystème global du transport aérien. Dans les régions moins avancées, une révolution de la sécurité est urgemment nécessaire pour protéger les passagers et les biens.

Au-delà des besoins en infrastructures et équipements (« hardware »), une forte culture de sécurité aéroportuaire doit émerger au sein du personnel aéroportuaire et des parties prenantes (« software »). Les aspects humains et organisationnels de la sécurité doivent être pris en considération. Cette culture doit être soutenue par la hiérarchie, adoptée par le terrain, permettre un reporting bottom-up, être transversal à l'ensemble de l'organisation aéroportuaire, et inclure également les parties prenantes. Cela signifie fournir des moyens et formations adéquats aux personnels opérationnels, et finalement mettre en œuvre des Systèmes de Gestion de la Sécurité (SGS). Cela signifie également favoriser une culture de la sécurité basée sur la transparence, des rapports non punitifs, les retours d’expérience et la gestion des risques.

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Thème n°6 : compatibilité aéroportuaire et espaces aériens

La flotte d'avions au sol et dans les airs se diversifiera au cours des prochaines décennies. L'espace aérien inférieur pourrait devenir plus occupé au cours des 5 à 10 prochaines années. L’Urban et Rural Air Mobility (UAM/RAM) promet une nouvelle ère de mobilité avec de nouveaux véhicules qui devraient être plus sûrs, moins chers, plus silencieux et plus écologiques que les hélicoptères d'aujourd'hui. Après avoir obtenu l'autorisation des régulateurs, ils pourraient permettre une augmentation de la capacité sur les trajets intra- et peut-être interurbains qui sont bienvenus dans les zones métropolitaines denses avec des problèmes de congestion aigus. L’UAM sera assurée par des aéronefs à décollage et atterrissage verticaux électriques (eVTOL) de différentes tailles, transportant de 2 à 6 passagers ou du fret léger. Les services comprendront le taxi aérien par hélicoptères électriques avec pilote et la livraison de colis par de petits drones (sUAS).

Des hélicoptères à grande vitesse comme les convertibles ou les hélicoptères équipés de moteurs propulsifs sont également à l'horizon et complèteront l'offre VTOL avec des performances de vol plus élevées. Bien qu'ils pourraient occuper une plus petite partie du marché des voilures tournantes civils et auront des coûts d'exploitation plus élevés que les véhicules eVTOL, ils pourraient être intéressants pour les applications où la vitesse est un facteur clé pour le succès de la mission, comme le transport médical aérien, la sécurité publique, certains taxis aériens et les services de desserte offshore.

L’avion électrique est une catégorie d’aéronefs plus larges qui comprend notamment les avions à voilure fixe propulsés par des moteurs électriques. Plusieurs prototypes ont été testés et le premier avion de transport léger équipé en retrofit d’un moteur électrique a volé en Décembre 2019. Les avions électriques ont des applications prometteuses pour l'aviation générale, les services de navette courte distance et l'aviation régionale. Cette technologie pourrait devenir une réalité commerciale au cours de la décennie 2020. La faisabilité de propulser des avions commerciaux de plus grande taille avec des moteurs électriques n'est pas encore clairement établie. Au lieu de cela, les avions plus larges pourraient avoir des systèmes de propulsion hybrides assistés électriquement pendant la phase de croisière pour réduire la consommation.

Les avions monocouloirs plus anciens et plus petits sont remplacés par des jets de conception plus avancée tels que l'Airbus A220, l'Embraer E-Jet E2 et le Mitsubishi SpaceJet. Ces avions monocouloirs sont désormais utilisés pour des services internationaux et ouvrent de nouvelles opportunités pour les petites et moyennes plateformes aéroportuaires. L’A321LR et XLR emprunteront bientôt des routes long-courriers, auparavant réservées aux avions de milieu de marché (MOM). Ces tendances signifient que les installations terminales et les aires de trafic doivent être plus polyvalentes qu'auparavant et compatibles avec une flotte plus diversifiée.

La fin de la production de l'A380-800 annoncée pour 2021 n'est pas la fin des avions plus larges (Large Aircraft). L'Airbus A380 et le Boeing 747-8 pourraient encore être exploité pour des services commerciaux à l'horizon 2040. La prochaine génération d'avions larges et longs est déjà présente avec les A350-1000 et 777-9. La croissance de la population mondiale, l'émergence de nouvelles mégalopoles à forte classe moyenne et la rareté des capacités côté piste/espace aérien justifient ces avions « jumbo ».

Les avions supersoniques seront probablement de retour dans les airs d'ici 2040. Près de 20 ans après le dernier vol de Concorde, au moins 3 projets portés par des start-ups américaines ont de nouveaux concepts inédits pour de petits jets supersoniques, destinés pour le service commercial et l'aviation d'affaires. Alors qu'une entrée en service (EIS) avant 2025 annoncée par ces entreprises semble ambitieuse, les démonstrateurs de Boom et de la NASA devraient voler dès 2021. De nouvelles normes seront nécessaires pour réglementer les émissions et le bruit de ces avions. Le retour du vol supersonique civil ne devrait pas entraver les efforts de l'industrie pour réduire l'empreinte environnementale de l'aviation.

Un marché civil hypersonique pourrait émerger à l'horizon 2070. L'idée d'utiliser des avions hypersoniques, des planeurs ou des fusées pour assurer une mobilité à très longue portée n'est pas nouvelle et a été proposée pour la première fois à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le développement de nouvelles technologies, et de nouveaux matériaux et procédés de fabrication pourrait les mettre à la disposition de l'aviation civile pour des services commerciaux ou pour l'aviation d'affaire. SpaceX a suggéré que son Spaceship réutilisable en cours de développement pourrait être utilisé pour voler sur des routes intercontinentales – telles que New York à Shanghai en moins de 40 minutes.

Que se passera-t-il si les compagnies aériennes elles-mêmes se divisent entre les opérateurs de vol fournissant des avions prêt-à-voler et titulaires d’un certificat d'exploitation, et les prestataires de mobilité développant l'offre commerciale et vendant des billets ? Ces charters d'un nouveau genre pourraient à la fois aider à tirer parti de la croissance dans les régions en plein essor où les exploitants aériens locaux doivent encore devenir plus sûrs et réintroduire plus de diversité sur les marchés matures. Ces exploitants pourraient en fait être les avionneurs eux-mêmes – ils forment déjà des pilotes et louent des avions. Des accords entre les différentes parties de ces « compagnies aériennes composites » qui pourraient être facilement recomposés et s'adapter aux évolutions de la demande pourraient être facilités par une nouvelle génération de contrats et de certificats propulsés par les technologies « blockchain ».

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Thème n°7 : aérogares et expérience client

Les exploitants d'aéroport étaient auparavant des gestionnaires d'infrastructure fournissant des installations aéronautiques en tant que service public. Leur vision est désormais davantage axée sur les passagers, et les exploitants aéroportuaires considèrent ces derniers comme leurs clients au point où ils peuvent parfois entrer en concurrence avec les transporteurs aériens pour leur fournir des services spécifiques. Les missions des exploitants aéroportuaires se transforment de fournisseurs d’installations à prestataires de mobilité ainsi que d’hôte se démarquant sur l'expérience qu'ils proposent.

Ils développent des services aux passagers qui ne sont peut-être pas tous commercialement viables mais qui ont un impact positif sur la satisfaction client. Les services innovants comprennent des lounges gratuits pour les voyageurs en correspondance, des divertissements à proximité des salles d'attente, des concerts et des expositions, des salles de lactation, des fontaines d'eau pour remplir les bouteilles et même des salles de yoga. Certains d'entre eux, comme les hôtels de l'aéroport, peuvent également être un avantage concurrentiel et une source de revenus. Les concessions et magasins aéroportuaires sont une autre source pour générer des revenus ancillaires substantiels. Ces espaces commerciaux font partie de l'expérience elle-même.

Les plus récents et plus grands terminaux passagers ont une structure polyforme et centralisée qui peut accueillir jusqu’à plusieurs dizaines de millions de passagers annuels sous un même toit. Le gigantisme ne doit pas entraver l'expérience client, l'efficacité opérationnelle et la résilience. Les concepts futurs doivent également être simple et modulable – ce qui n'est pas nécessairement une question de forme ou de configuration du bâtiment. Les terminaux passagers doivent aller au-delà des conceptions architecturales grandioses et revenir aux racines de la conception des terminaux : fournir un accès simple, transparent et agréable à l'avion depuis le curbside. Il y a une course au plus grand « terminal-cathédrale » entre les méga-aéroports. Mais nous ne devons pas oublier que de nombreux passagers veulent simplement se rendre de leur voiture ou de leur système de transport en commun à la porte d’embarquement, ou de porte à porte pour de courtes correspondances.

La modularité devrait être une autre fonction assurée par les futurs terminaux. Alors que le transport aérien connaît une forte croissance à long terme, le trafic aérien est également très sensible aux ralentissements économiques temporaires qui peuvent conduire à des transformations rapides du marché telles que les consolidations des compagnies aériennes et les décisions stratégiques avec des décisions impactantes pour les aéroports, d'une restructuration du réseau ; voire à une réduction du nombre de hubs pour une même compagnie. La dernière décennie a vu émerger d'autres nouveautés telles que les transporteurs aériens long-courriers et low-cost, et les avions monocouloirs utilisés sur des routes long-courriers qui nécessitent des configurations intérieures des terminaux plus agiles afin de traiter des avions différents de manière assez dynamique, ainsi qu’une alternance de passagers domestiques et internationaux. Les changements géopolitiques et les autres perturbations qui modifient les normes et les pratiques sont d'autres dilemmes pour les aéroports. Les technologies de l'information et de l’intelligence pourraient à terme influencer la façon dont l'espace et les ressources sont utilisées et modifier les ratios et valeurs de référence utilisés par l'industrie pour la planification et la conception.

En fin de compte, assurer les fondamentaux de manière solide est aussi important que créer un effet « wow ». La priorité absolue d'un passager est de localiser la porte d'embarquement ou de récupérer son bagage et de sécuriser son trajet depuis l’aéroport pour arriver à l'heure à la destination finale. Les applications et les services peuvent alléger la charge mentale du passager, améliorer l'expérience et peut-être augmenter les revenus ancillaires. Mais la simplicité n'est pas synonyme de faible coût. Les terminaux low-costs montrent leurs limites car ils ne répondent pas aux attentes des passagers. Cela pourrait être un paradigme difficile à aborder pour certains exploitants d'aéroport qui ont besoin de fonds pour entretenir ou moderniser leurs installations tout en étant confrontés à une forte opposition des transporteurs aériens à payer des redevances adéquates pour ce faire.

Des terminaux efficaces et adaptés aux passagers constitueront un avantage concurrentiel clé pour les transporteurs aériens. Les transporteurs et les alliances dépensent beaucoup d'argent pour moderniser les terminaux et les personnaliser afin d’offrir une expérience haut de gamme cohérente d'un aéroport à l'autre. La prochaine compétition se déroulera sur les premiers et derniers kilomètres – de la porte d’embarquement au curbside. Les compagnies aériennes et les aéroports pourraient s’allier ou du moins mieux se coordonner avec les TNC pour simplifier cette partie du voyage. Il est déjà possible dans certaines villes d'enregistrer les bagages dans les hôtels ou la gare avant l’aéroport. Des services supplémentaires seront proposés, tels que la collecte et la livraison des bagages à domicile ou au travail.

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Thème n°8 : performance et résilience opérationnelles

Les aéroports et les systèmes d'aviation sont des écosystèmes complexes qui participent à l’économie mondiale et assurent le mouvement sûre et efficace des passagers et du fret. Alors que des crises telles que la Grande Récession et la pandémie de COVID-19 ont des effets négatifs à court terme, le trafic aérien a une résilience à long terme prouvée qui conduit les prévisionnistes à entrevoir un taux de croissance annuel mondial d'au moins 4,5% d’ici 2040. Améliorer la prise en charge de ce trafic croissant en améliorant la ponctualité et la résilience a été l'une des principales préoccupations de l'effort de modernisation de la gestion du trafic aérien que le monde a entrepris dans le cadre du Plan Mondial de Navigation Aérienne (GANP) de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI).

La collaboration entre les parties prenantes des opérations en temps réel a changé la donne partout où elle a été mise en œuvre. Les différentes organisations représentant toutes les parties prenantes des opérations aéroportuaires ont appelé à la fin du fonctionnement en « silo » et ont soutenu le concept d'Airport Collaborative Decision-Making (A-CDM). Les avantages de la collaboration sont énormes. Une évaluation réalisée par EUROCONTROL en 2016 montre que dans 17 aéroports CDM en Europe, le retard ATFM a été réduit de 10,3%, le temps de taxi moyen de 7% et la consommation de carburant, les émissions de CO2 et de SO2 de 7,7%. L'Europe et les États-Unis ont été les pionniers de la prise de décision collaborative.

La gestion prédictive sera la prochaine étape clé. Une collaboration avancée a mis à disposition une grande quantité de données sur les opérations aériennes collectées dans les Bases de Données des Opérations Aéroportuaires (AODB) et d'autres référentiels. Le traitement de ces données via des systèmes et des organisations intelligents pour prévoir les perturbations potentielles, déclencher des actions préventives avant qu'elles ne se produisent, et éventuellement atténuer leurs effets, devient désormais possible. De plus, cette approche de gestion prédictive pourrait être la prochaine étape dans l'avancement de la gestion des aéroports et de la navigation aérienne alors que les grands programmes de modernisation tels que SESAR et NextGen arrivent à leur terme, et le GANP de l'OACI lui-même ne fournit pas encore de cadre pour la période au-delà de 2030.

La résilience commence le premier jour d'exploitation d'une nouvelle installation avec le processus de Préparation Opérationnelle et de Transfert Aéroportuaire (ORAT). La mise en service d'une nouvelle infrastructure peut être difficile, en particulier lorsqu'une capacité massive est livrée en même temps, comme le nouvel aéroport international de Beijing Daxing (PKX) et l'aéroport d'Istanbul (IST). Les architectes, les concepteurs et les ingénieurs doivent garder à l'esprit que l'innovation doit au final servir l’exploitation. Les premiers systèmes intelligents dans l'aviation sont les professionnels de l'aviation eux-mêmes. Les aéroports doivent être faciles à entretenir et à exploiter. Certains éléments architecturaux peuvent rendre impossible la tâche du personnel d'exploitation. Le changement d'un luminaire ne doit jamais nécessiter d'équipement sur mesure. Les systèmes mécaniques, électriques et de plomberie (MEP) doivent être accessibles aux équipes de maintenance. Un aéroport n'est un chef-d'œuvre que s'il est beau et fonctionne efficacement en même temps.

Le changement climatique fait peser des menaces particulières sur la résilience. Ses effets sur nos systèmes d'infrastructure sont déjà visibles en 2020. D'importantes anomalies climatiques ayant un impact direct sur nos vies sont enregistrées depuis plus de deux décennies. Ils vont de records de températures élevées à de violentes tempêtes hivernales, et ils ont des conséquences directes sur la santé et la disponibilité des infrastructures aéroportuaires ainsi que sur les dépenses d'exploitation et les dépenses d’investissement. Certains de ces événements ont créé de nouveaux paradigmes au niveau régional. Au-delà des conditions météorologiques extrêmes, le climat évolue mondialement. Selon une étude de l'ETH Zürich, le climat de 2050 à Londres sera similaire à celui de Barcelone aujourd’hui. Seattle pourrait connaître des conditions proches de celles de San Francisco aujourd'hui. Nairobi pourrait ressembler à Maputo et Tokyo à Changsha. De tels changements redéfiniront les critères de conception et d'exploitation des aéroports, tels que la crue centennale, la température moyenne ou la distribution des vents.

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Thème n°9 : territoires et mobilité

Les aéroports n'ont pas de communautés «environnantes» ou «voisines». Ils sont partie intégrante de ces collectivités et en sont des membres à part entière. Les territoires aéroportuaires peuvent prendre différentes formes et dimensions même pour un seul aéroport, selon le cas. Dans le cadre de cette discussion, nous avons considéré les concepts de communautés intérieure et extérieure. La communauté intérieure, à proximité directe de l'aéroport, est exposée à des avantages économiques directs et spécifiques, mais aussi à des externalités négatives (exposition au bruit plus élevée). Celle-ci comprend les villes où se situent l'aéroport ainsi que celles tournées vers l'aéroport parce qu'elles en dépendent économiquement ou sont directement exposées à ses externalités. Une attention particulière de l'aéroport devrait être donnée à la poursuite d’une coexistence pacifique et mutuellement avantageuse avec ses voisins. Cet objectif pourrait être atteint en les aidant à isoler les maisons et les lieux de travail contre le bruit, le cas échéant, et en élaborant un plan d’occupation des sols adéquat pour permettre un développement juste et équilibré. La communauté extérieure, elle, est desservie par l'aéroport et peut englober sa zone de chalandise principale pour inclure la macrorégion. Cette-ci comprend une grande variété de parties bénéficiant ou étant concernées par l'aéroport. Cela comprend les passagers locaux qui voyagent vers ou depuis leur aéroport de proximité, les entreprises et partenaires économiques à la recherche d'un aéroport dynamique les soutenant avec des vols directs, les gouvernements locaux et diverses agences impliquées dans le large éventail de défis et opportunités liés à l'aéroport, etc. Son empreinte pourrait s’étendre jusqu’ à l’aire métropolitaine et les régions avoisinantes, selon les aspects considérés. Les grandes plates-formes aéroportuaires sont des portes d’entrée pour des régions et des pays entiers. Les aéroports situés dans des zones reculées et peu peuplées offrent des opportunités pour de vastes territoires.

La communauté intérieure du futur devrait être connectée et soutenue par son aéroport. Les impacts négatifs et en particulier le bruit doivent être mieux considérés dans les pays où les politiques de gestion de territoire et les programmes d'isolation ne sont pas encore en place ou appliqués. Mais les problèmes liés aux territoires dépassent les aspects de bruit et de pollution qui sont développés dans le thème n°10. L'accessibilité autour d’un aéroport peut être paradoxalement complexe lorsque tous les transports terrestres sont dirigés vers l'aéroport et conçus pour diriger les passagers vers d'autres centres de résidence, de consommation et de décision. Les aéroports favorisent de plus en plus le recrutement local pour favoriser l'intégration des populations avoisinantes afin de réduire le chômage, offrir des possibilités de mobilité sociale, et développer une communauté centrée sur l'aéroport. En retour, une communauté intérieure dynamique peut développer tout un écosystème de petites entreprises qui peuvent finalement être connectées à des activités aéroportuaires ainsi qu’un centre d’activité aéroportuaire qui sera desservi par divers services locaux. Cependant, plusieurs aéroports dans le monde ont des zones résidentielles à proximité immédiate. Elles sont souvent habitées par des ménages à faible revenus – et des communautés sans voix dans certaines parties du monde. Quelquefois, ces communautés déménagent autour des aéroports éloignés de leurs habitations d'origine en raison d'une gentrification incontrôlée sans composante de justice sociale. La gentrification climatique est un problème émergent qui pourrait aggraver ce phénomène. Dans le même temps, ces mêmes terrains pourraient devenir la cible de promoteurs immobiliers industriels ou commerciaux. Cela demande une attention particulière concernant la justice sociale dans la planification et le développement.

La mobilité sera l'un des principaux défis des horizons 2040 et 2070 pour les aéroports desservant de grandes communautés extérieures. Presque toutes les grandes régions métropolitaines sont confrontées à des symptômes de congestion aiguë. Moscou, Istanbul, Bogota, Mexico, Sao Paulo, Londres, Rio de Janeiro, Boston, Los Angeles et Rome sont parmi les pires villes du monde en ce qui concerne le nombre moyenne d'heures cumulées passées dans la circulation chaque année. L'accessibilité a un impact direct sur l'attractivité des aéroports en tant que mode de transport et lieu de travail. Nous sommes à l'orée d'une révolution de la mobilité urbaine, et les aéroports doivent en tenir compte pour accroître leur attractivité et leur connectivité avec leurs collectivités. Des transports en commun de masse sont mis en service dans de nouvelles villes, y compris dans des pays qui étaient historiquement réticents à les financer. Peut-être plus près de nous qu'il n'y paraît, les véhicules automatisés et connectés (AV/CV) ouvriront de nouvelles perspectives avec une mobilité à bas prix largement disponible et accessible qui pourrait même remplacer à un moment donné le véhicule individuel. Cependant, si les AV/CV pourraient optimiser l'utilisation des routes grâce à une coordination de réseau à l'aide de l'intelligence artificielle, ils ne soulageront pas la congestion existante car ils partageront les ressources au sol disponibles avec les modes et les véhicules existants. Les AV/CV remplaceront ou ajouteront des véhicules supplémentaires au trafic existant. Si elles sont très abordables, l'offre TNC basée sur les AV/CV pourrait même séduire les utilisateurs actuels des transports en commun, réduire les revenus des transports publics et aggraver les problèmes de congestion. Il faut donc repenser la mobilité et sortir des sentiers battus pour développer de nouvelles capacités complémentaires aux modes existants. Dans les grandes villes disposant déjà de tels systèmes mais étant toujours confrontées à de graves problèmes de congestion, des modes innovants émergeront. La ressource étant rare au niveau du sol, les options souterraines et aériennes seront explorées. L’Urban Air Mobility (UAM) est prometteur pour fournir des liaisons point à point depuis l'aéroport. Dans les grandes aires métropolitaines, l'avenir tient très probablement dans une combinaison de solutions de mobilité urbaine existantes et nouvelles – comme c'est souvent déjà le cas – pour répondre à la demande.

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Thème n°10 : durabilité et aéroport-citoyens

Comme toute activité humaine, le transport aérien a des conséquences négatives. Le bruit des avions a été le premier problème lié à l'aéroport a être reconnu comme tel. Les programmes et activités visant à réduire le nombre de personnes affectées par le bruit ont eu des résultats significatifs depuis les années 1970 dans plusieurs pays. Cependant, selon l'OACI, l'empreinte de la surface de bruit DNL 55 dB provenant de 315 aéroports de service commercial représentant 80% du trafic mondial pourrait doubler si aucun progrès technologique n'était réalisé entre-temps sur les avions. L'empreinte de 2015 représente 14 400 km2 ainsi que 30 millions de personnes. Des améliorations technologiques avancées mais réalisables pourraient stabiliser cette exposition au bruit accumulée à son niveau de 2015 et même la réduire. Alors que les avionneurs et les concepteurs de moteurs travaillent sur de telles améliorations, les aéroports et les gouvernements ont également un rôle important à jouer pour réduire cette empreinte, améliorer l'isolation des maisons les plus exposées et réduire le nombre de résidents impactés sur le long terme. Les Standards et Pratiques Recommandées (SARP) de l’OACI sur le bruit des aéronefs dans les aéroports comprennent le cadre de certification du bruit des aéronefs. Il comprend également les orientations élaborées dans le cadre de «l'approche équilibrée de la gestion du bruit des aéronefs» (Doc 9829). Cette analyse de l'approche équilibrée est spécifique à la géographie, au trafic et aux conditions de chaque aéroport. De plus, une analyse sociale et économique doit être entreprise pour chaque mesure envisagée. La pollution aérienne (par exemple les NOx et particules) et les émissions à effet de serre (notamment le dioxyde de carbone) sont les principaux types d’émissions gazeuses d'un aéroport. Les aéroports doivent avoir une vision globale de ces émissions lors de l'élaboration d'un plan de développement durable. Les émissions des avions, les services d'assistance en escale, les terminaux de passagers et les infrastructures support, les infrastructures côté ville, mais aussi le transport terrestre depuis et vers l'aéroport pour les passagers et les employés de l'aéroport, ainsi que les émissions de leur chaîne d'approvisionnement doivent également être pris en compte.

L'aviation est essentielle à notre économie moderne et mondialisée. L'aviation soutient la plupart des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD), élaborés par les Nations Unies en 2015. Une étude approfondie a été élaborée par l'Air Transport Action Group (ATAG) en 2017. Les aéroports contribuent de manière considérable au bien-être économique des régions. Ce sont des centres d'emploi direct et indirect: le personnel employé directement par les exploitants d'aéroport et par d'autres entités aéroportuaire représente plus de 6,1 millions d'emplois dans le monde. Les aéroports investissent massivement pour l'entretien et le développement de leurs infrastructures, ce qui crée de nouveaux emplois locaux. Il permet un large éventail d'opportunités et élargit l'horizon des possibilités, attirant les entreprises, les résidents et les touristes. Les aéroports créent des opportunités de mobilité à grande vitesse entre les villes, les régions et les pays offrant des connexions directes au monde pour les industries et les investisseurs. L'aviation ne profite pas qu'aux grandes entreprises. Il crée de nouveaux débouchés pour les petits producteurs locaux. Le tourisme a été un puissant contributeur économique et un moteur de développement pour de nombreuses régions et pays du monde entier. Plus de la moitié des touristes internationaux voyagent par avion. En 2001, 72% des touristes visitant le Costa Rica sont arrivés en avion. Alors que le pays s'est engagé à arrêter l'extraction minière, à stopper la déforestation et à se concentrer sur des ressources plus durables telles que le tourisme responsable, le transport aérien est une nécessité pour atteindre ces objectifs. Les aéroports assurent la mobilité dans les zones reculées ou peu peuplées. Les missions d'aide humanitaire et de recherche et sauvetage ont également besoin d'installations aéronautiques pour soutenir leurs opérations. Dans les zones reculées et sur de vastes territoires, la connectivité fournie par le transport aérien peut être plus durable que si une infrastructure terrestre était construite. Pour de nombreux pays insulaires et territoires d'outre-mer, le transport aérien est le seul moyen de se connecter au monde et de déplacer les passagers et les marchandises d'île en île en temps raisonable.

L'impact des aéroports – et de l'aviation dans son ensemble – sur le changement climatique est pris en compte depuis plusieurs décennies. L'aviation représente environ 2% des émissions mondiales de CO2, une part constante depuis le début des années 1990, même si les émissions absolues augmentent régulièrement en raison de la demande croissante de voyages en avion. Bien que le CO2 soit le seul gaz à effet de serre (GES) émis de manière significative par l'aviation, d'autres polluants (NOx, particules fines, etc.) sont également émis. Une partie de ces émissions se produisent à haute altitude, ce qui pourrait augmenter son impact net selon les modèles. Cependant, il existe encore une incertitude sur la contribution directe exacte de l'aviation au changement climatique en raison de la complexité de sa chimie. Par exemple, les NOx contribuent à la génération d'ozone (augmentant l'effet de serre) dans certaines conditions, et à l'appauvrissement en méthane à d'autres altitudes (réduisant ce même effet). De plus, l'impact des traînées de condensation (contrails) et leur capacité à générer des cirrus doivent être pris en considération. Le programme Airport Carbon Accreditation d'Airports Council International (ACI) est une initiative mondiale de gestion du carbone qui cible spécifiquement les émissions des aéroports. Le programme est soutenu par l'OACI depuis 2011. L'initiative fournit un cadre pour les aéroports afin de réduire leur empreinte carbone grâce à des initiatives vertes locales ainsi que la compensation carbone dans un objectif de neutralité. Plusieurs aéroports ont déjà atteint le plus haut niveau de certification (Niveau 4) qui implique la neutralité carbone. Le programme Airport Carbon Accreditation ne doit pas être sous-estimé comme moyen de réduire l’empreinte de chaque aéroport, tout comme le programme Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation (CORSIA) de l’OACI. Cependant, ceci n'est qu'un premier pas vers des aéroports plus verts. La décarbonisation complète des aéroports nécessitera la réduction et, dans la mesure du possible, l'élimination des émissions à la source.

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Thème n°11 : ressources humaines et éducation

La plupart des descriptions de postes de 2040 et 2070 comprendront des exigences et des missions qui n'existent pas aujourd'hui. 50 ans voir même 20 ans auparavant, les aéroports n'avaient ni Community Manager ni Safety Manager. Ce sont désormais des fonctions essentielles des aéroports modernes. La technologie est également un moteur important de ces changements. Par exemple, le SIG aéroportuaire a créé des emplois et s'est avéré être un outil précieux pour d'autres avec des applications allant de la gestion d'actifs jusqu’à l'information aéronautique. De nombreux emplois vitaux des horizons 2040 et 2070 n'existent pas encore. Nous ne sommes même pas certain d’être en mesure de les imaginer. Le lieu de travail lui-même évolue. Une partie des tâches peut désormais être effectuée à distance – y compris à domicile – avec une productivité identique ou supérieure. Mais les humains sont des êtres sociaux. Ils doivent se rassembler et partager ensemble. Le bien-être au travail et un environnement de collaboration sont des facteurs clés de la performance et de l'efficacité. Être un bon employeur au regard du bien-être au travail est également important pour attirer et retenir les talents. Des études démontrent que les jeunes employés préfèrent avoir la possibilité de travailler à domicile, mais dans le même temps, souhaitent un niveau d'interaction plus élevé avec leurs collègues et leur direction. L'avenir ne peut pas être uniquement fait de systèmes, mais doit reposer sur humains avec plus de liberté et de flexibilité, interagissant les uns avec les autres et progressant à un rythme plus rapide grâce aux systèmes. Les travailleurs accordent de plus en plus d'importance aux valeurs des organisations, à la finalité de leur travail, à l'interaction avec leur management, à la collaboration avec leurs collègues et parties prenantes ainsi qu’à la flexibilité dont ils peuvent disposer pour gérer leur quotidien.

Alors que de nouvelles technologies apparaissent constamment et que la succession de découvertes innovantes s'accélère, une nouvelle approche pour le changement et la gestion des connaissances est nécessaire. Les chocs technologiques similaires à la première révolution informatique qui a exigé à plusieurs générations d'apprendre et de transitionner vers les ordinateurs et les systèmes d'information il n’y a pas si longtemps seront plus fréquents. Les jeunes professionnels fraîchement diplômés devront peut-être déjà commencer à acquérir de nouvelles compétences vitales peu de temps après avoir quitté l'école. Les organisations pourraient également avoir à s'adapter. La gestion du changement fera partie des opérations régulières. Les aéroports devront rapidement identifier ces changements émergents, évaluer leurs effets sur les conditions existantes, adapter leur organisation et former leur personnel pour réussir. Il ne serait pas surprenant d'avoir des postes de responsable du changement à temps plein dans de nombreux aéroports et organisations. La prochaine grande révolution pourrait être une autre révolution «informatique» avec l'émergence des technologies de l’intelligence. Nous sommes à l’aube de l'introduction de l'intelligence artificielle et du machine learning à grande échelle. Penser cette deuxième révolution informatique seulement comme une modification de la façon dont nous interagissons avec les appareils et les systèmes électroniques existants serait très réducteur. Cette révolution ouvrira un large champ d'applications et de systèmes complètement nouveaux que nous pouvons à peine envisager aujourd'hui. Certains d'entre eux aideront les opérateurs humains. D’autres pourraient même nous remplacer pour certaines prises de décision. Cette situation créera de nouveaux besoins pour des spécialistes capables de développer et d'entretenir ces systèmes, de s'assurer qu'ils interagissent correctement, et d'interpréter leurs résultats – tels que des scénarios de simulation – pour la prise de décision finale. Cela va changer profondément nos interactions avec notre monde, y compris la façon dont nous nous déplaçons, communiquons, apprécions, consommons et travaillons.

La discrimination sexuelle coûte à elle seule jusqu'à 12 milliards USD à l'économie mondiale – 16% du revenu mondial. Les femmes sont historiquement sous-représentées dans la main-d'œuvre des transports et victimes de préjugés au cours de leur carrière. Parce que le monde est notre invité, nous devons être le reflet de la diversité de nos clients et de nos communautés pour rester compétitifs et innovants. La diversité dans les équipes et les directions est cruciale pour comprendre et résoudre les problèmes complexes de demain. La diversité ne se limite pas au sexe et à l'origine ethnique, mais elle comprend mais ne se limite pas seulement à l'âge, à l'orientation sexuelle, aux besoins spéciaux, à la culture, au statut socioéconomique et à l'expérience non aéroportuaire ou aéronautique. Des études ont montré les avantages de la diversité dans les organisations de manière flagrante. Alors que le 20ème siècle n'a pas répondu aux attentes en matière de liberté, de justice et de progrès pour tous, ce 21ème siècle ne doit pas suivre le même chemin. Notre monde ne peut se permettre les discriminations et les préjugés d’hier. Ils ne vont pas seulement à l'encontre des valeurs très fondamentales de l'aviation qui sont exprimées dans la Convention de Chicago sur l'aviation civile et se reflètent dans la diversité de nos clients et équipes. Ils empêchent les talents d'émerger, les innovations de prendre leur envol et les opportunités de se réaliser. Pour relever les défis de 2040 et 2070, éliminons les discriminations et les biais une fois pour toutes.

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